Le prêtre et les femmes: à l’occasion de la clôture de l’Année Sacerdotale

Ana Cristina Villa Betancourt

Il y a quelques semaines à Rome des moments uniques ont été vécus qui ne peuvent avoir lieu que dans la ville de Pierre, cœur de la chrétienté : la rencontre d’environ 15000 prêtres avec le Saint-Père, un jeudi après-midi, pour une Veillée d’Adoration Eucharistique et le matin suivant la plus grande concélébration de l’histoire en la Solennité du Sacré Cœur de Jésus. L’émouvante scène d’une Place Saint-Pierre envahie de prêtres en aubes blanches est restée imprimée comme l’image de ce qui a été un moment de grâce vraiment spécial pour toute l’Église. Se concluait ainsi l’Année Sacerdotale, convoquée par Benoît XVI pour commémorer les 150 ans de la mort de Saint Jean-Marie Vianney et dédiée au renouvellement de l’identité et de la vocation des prêtres. Il nous a semblé impossible de laisser passer cette occasion unique et spéciale sans nous arrêter un instant pour réfléchir sur la figure du prêtre et sa relation avec la femme.

En 1995 – année importante au niveau international pour les femmes puisque se réunit à Pékin la IVème Conférence Mondiale des Nations Unies sur la femme – le vénérable Jean-Paul II a dédié un bon nombre de ses réflexions sur la dignité et la vocation des femmes. Parmi ces réflexions, en lien avec notre thème, rappelons la Lettre aux Prêtres du jeudi saint, dédiée cette année-là, à la relation entre le prêtre et la femme. L’inoubliable Pontife écrivait alors que « la condition de mère et celle de sœur sont les deux dimensions fondamentales du rapport entre la femme et le prêtre » (1), dimensions qui permettent, selon ses paroles, une relation mure et sereine ; une relation qui signifie un enrichissement et une collaboration mutuels. Dans une perspective qui n’est pas si naïve, car elle n’ignore pas les difficultés qui peuvent surgir, le Saint-Père soulignait la richesse et les fruits positifs qui peuvent naître d’une relation réciproque, vécue dans la fidélité totale au don du célibat sacerdotal. La lettre touche beaucoup d’autres points comme la figure de Marie et sa maternité spirituelle de tous les hommes et en particulier des prêtres ; les femmes des Évangiles en particulier dans les moments clés de la Passion et de la Résurrection ; points qu’il est bien entendu impossible d’analyser tous ici.

Inspirés par ces réflexions de Jean-Paul II, nous pourrions nous demander : en quoi consistent et quelles sont les particularités de ces relations de fraternité et collaboration entre les prêtres et les femmes ? Il est facile d’associer ces réflexions de Jean-Paul II avec d’autres présentes dans la Mulieris dignitatem, de quelques années plus tôt, quand il affirmait : « Dans l'“unité des deux”, l'homme et la femme sont appelés depuis le commencement non seulement à exister “l'un à côté de l'autre” ou bien “ensemble”, mais aussi à exister réciproquement “l'un pour l'autre” » (2); l’homme et la femme sont appelés à la communion, à la rencontre. Dans ce contexte l’existence de l’“autre” constitue l’aide assortie que le Créateur estime nécessaire (Cf. Gn 2, 18), et qui est une aide réciproque. Dans la Genèse, le mariage est indiqué comme la dimension première et fondamentale de cet appel, mais le Pape nous dit que : « ce n’est pas la seule ». Ce principe d’être réciproquement l’un “pour” l’autre signifie que c’est Dieu lui-même qui a voulu l’intégration du masculin et du féminin dans l’histoire de l’humanité. Dans la Lettre aux Evêques de l’Église Catholique sur la collaboration de l’homme et de la femme dans l’Église et dans le monde, nous lisons que « l’Église, éclairée par la foi en Jésus Christ, parle […] d'une collaboration active entre l'homme et la femme, précisément dans la reconnaissance de leur différence elle-même » (3).

En guise de première réponse à notre question nous avons donc les idées de collaboration, de complémentarité, d’enrichissement réciproque, de l’importance de la différence et du dialogue entre hommes et femmes. Ces inspirations seront transmises de façon adéquate aux personnes selon les circonstances.

Pour continuer à approfondir la relation entre les prêtres et les femmes, il pourrait être utile aussi de rappeler l’initiative de la Congrégation pour le Clergé qui, en 2007, a convoqué au niveau mondial l’Adoration Eucharistique pour la sanctification des prêtres et la promotion de la maternité spirituelle surtout parmi les femmes consacrées qui, sur l’exemple de Marie, Mère du Grand Prêtre Éternel et Collaboratrice de son œuvre de Rédemption, adoptent spirituellement les prêtres en les aidant par leurs offrandes, la prière et la pénitence (4). Cette maternité spirituelle se vérifie chez les prêtres en premier lieu dans la personne de leur propre mère, qui bien souvent, non seulement leur a donné la vie mais les a accompagnés et soutenus au début et dans l’affirmation de leur vocation sacerdotale. Un très bel exemple de cette maternité spirituelle qui brille à travers les siècles est celui de Sainte Monique, laquelle non seulement donna à la lumière dans la chair son saint fils Augustin, mais offrit également sans relâche ses prières et ses sacrifices pour lui, jusqu’à ce qu’elle parvienne à sa conversion à Dieu.

Une relation de fraternité donc, en étant sœurs pour les prêtres, en les accompagnant et les soutenant, en offrant nos conseils et, quand elles sont nécessaires, aussi nos critiques, nos visions “différentes” et “complémentaires” des réalités, avec un amour pur et libre de toute attitude possessive malsaine mais en respectant toujours une distance cordiale ; un amour centré avant tout sur le respect de la noble et sacrée vocation qu’ils ont reçue et qui essaie d’aider cette vocation dans toute la mesure du possible. Et en complément, une relation de maternité spirituelle qui essaie surtout de “donner la vie” à travers la prière et l’abnégation. La maternité spirituelle, spécialement envers les prêtres, est une vocation de service, bien souvent cachée et vécue dans le silence mais pleine de sens. Avec elle nous pouvons soutenir, grâce à l’invisible mais puissante force de la prière, la stupéfiante vocation de ces hommes, qui malgré leurs faiblesses humaines, sont appelés à rendre présent Dieu lui-même, son amour, son pardon, sa miséricorde au milieu du monde. Les faits survenus ces derniers mois, qui ont blessé et affaiblie la dignité sacerdotale, et l’appel du Saint-Père à la purification et à la pénitence, rendent encore plus urgente et nécessaire cette vocation.

Dans l’homélie prononcée lors de la Messe de clôture de l’Année Sacerdotale, Benoît XVI encourageait les prêtres à « répondre au courage et à l’humilité de Dieu par notre courage et notre humilité » (5); Dieu continue à confier ses trésors les plus précieux à de pauvres « vases d’argile ». Nous aussi comme femmes nous pouvons répondre avec courage et humilité en assumant nos rôles de sœurs et de mères, en nous donnant au service du Seigneur et de son Église avec tout l’amour dont nous sommes capables avec notre cœur féminin. 

 

1. JEAN-PAUL II, Lettre aux prêtres 1995.

2. ID., Mulieris Dignitatem, 7. 

3. CONGREGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Lettre aux Evêques de l’Église Catholique sur la collaboration de l’homme et de la femme dans l’Église et dans le monde, 4.

4. CONGREGATIO PRO CLERICIS, Eucharistic Adoration for the Sanctification of Priests and Spiritual Maternity, 2007. Trouvé sur http://www.clerus.org/clerus/dati/2008-01/25-13/Adoration.html.

5. BENOIT XVI, Homélie de la Messe à l’occasion de la conclusion de l’Année Sacerdotale, 11 juin 2010.

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